Licenciement pour inaptitude et consultation CSE

6 Juil. 2022 | Droit du travail

L’employeur est dispensé de consulter le CSE quand il a été dispensé d’effectuer des recherches de reclassement par le médecin du travail. 

Depuis 2017, la procédure de licenciement pour inaptitude professionnelle et non-professionnelle a été unifiée.

Pour rappel, lorsqu’un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, que cette inaptitude soit d’origine professionnelle ou non-professionnelle, l’employeur a l’obligation de lui proposer, après avis du CSE s’il existe, un autre emploi approprié à ses capacités en tenant compte des préconisations du médecin du travail et des indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existant dans l’entreprise (art. L. 1226-2 et L. 1226-10 du Code du travail).

Néanmoins, l’employeur est dispensé de recherche de reclassement lorsque l’avis du médecin du travail constate (art. L. 1226-12 et L. 1226-2-1 du Code du travail) :

  • Soit que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ;
  • Soit que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi.

Le 8 juin 2022, la Cour de cassation a jugé que lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi, l’employeur, qui n’est pas tenu de rechercher un reclassement, n’a pas l’obligation de consulter les représentants du personnel (Cass. soc. 8 juin 2022, n°20-22.500).

Elle énonce clairement que si le médecin du travail choisit de dispenser l’employeur de toute recherche de reclassement au moment de la transmission de l’avis d’inaptitude, il n’est pas nécessaire de consulter le CSE.

L’arrêt rendu par la Cour de cassation a d’autant plus d’intérêt qu’il concerne l’inaptitude d’origine professionnelle à la suite d’un accident du travail. Cette solution a vocation à s’appliquer également en cas d’inaptitude d’origine non-professionnelle.

La position retenue par la Cour de cassation est de bon sens.

L’obligation de consulter le CSE s’impose lorsqu’elle porte sur le contrôle d’une tentative de reclassement. A l’inverse, en cas d’impossibilité de reclassement constatée par le médecin du travail, l’employeur n’a pas à effectuer des recherches de reclassement, ce qui prive de tout objet la consultation des représentants du personnel sur ce point.

Attention : cette solution ne concerne que les cas où l’employeur est dispensé de reclassement du fait de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi.

Lorsque l’impossibilité de reclassement résulte de la seule appréciation de l’employeur, qui estime qu’aucun poste disponible dans l’entreprise n’est susceptible d’être proposé au salarié compte tenu de ses capacités résiduelles, la consultation du CSE s’impose obligatoirement, surtout en matière d’accident du travail, car dans ce cas l’absence de consultation expose l’entreprise à diverses sanctions.

Dans ce cas, un licenciement pour inaptitude prononcé sans consultation préalable du CSE est sanctionné par une indemnité qui ne peut être inférieure au salaire des 6 derniers mois (Article L. 1235-3-1 du Code du travail) (Cass. soc. 13 décembre 1995, n° 92-44.490), de même qu’une consultation qui n’aurait pas été assortie de la fourniture de toutes les informations nécessaires quant au reclassement du salarié (Cass. soc. 13 juillet 2004, n° 02-41.046). L’irrégularité de consultation peut également être constitutive du délit d’entrave (Cass. crim. 26 janvier 1993, n° 89-85.389).

L’employeur doit donc être vigilant dans l’interprétation de l’avis d’inaptitude et s’assurer que la formulation retenue par le médecin du travail correspond précisément aux mentions d’exclusion de recherche de reclassement prévues par la loi.

Auteur de l’article

Maxence DUCELLIER
Avocat associé à Elige Bordeaux

bordeaux@elige-avocats.com 

0 commentaires

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

OFFRE DE STAGE – Stage d’une durée de 2 mois en Droit des affaires

Elige Bordeaux recrute un stagiaire H/Fpour une immersion complète d'une durée de deux mois,qui sera rattaché au département en Droit des affaires.LE POSTE Elige Bordeaux recherche actuellement un stagiaire, pour une immersion complète d'une durée de deux mois, qui...

Quelle forme doit prendre les délibérations d’un conseil municipal permettant au maire de se constituer partie civile au nom de la commune ?

La chambre criminelle de la Cour de cassation par un arrêt en date du 4 avril 2023 met un terme à la conception selon laquelle la délégation pour agir en justice dévolue au maire ne pouvait pas se borner à viser ou à reproduire l'article L. 2122-22 du code général des...

OFFRE EMPLOI – Avocat collaborateur H/F en Droit de la famille, des personnes et du patrimoine

Elige Bordeaux recrute un avocat collaborateur H/Fen droit de la famille, des personnes et du patrimoine.L'OFFRE La société d'avocats Elige Bordeaux, recherche un avocat collaborateur H/F à temps plein pour renforcer son équipe, avec de préférence un ou deux ans...

Prescription raccourcie et responsabilité de la banque

Il pèse sur le banquier l'obligation de mettre en garde l'emprunteur non averti contre les risques d'un endettement excessif. Il s'agit pour le banquier d'attirer l'attention de son client, chaque fois que celui-ci souhaite souscrire des engagements qui ne paraissent...

L’effet interruptif de la saisie immobilière : jusqu’à quand ?

La saisie immobilière est une mesure d'exécution. Elle a donc nécessairement un effet interruptif. Mais il arrive que même après la vente de l'immeuble du débiteur, le créancier ne soit pas entièrement réglé, et qu'il doive envisager d'autres poursuites. A partir de...

Le surendettement : contester les mesures interrompt la prescription

La prescription est la manière la plus stupide de perdre sa créance, pour le créancier. Elle sanctionne le fait que le créancier n'a pas été suffisamment diligent pour réclamer en temps utile ce qui lui était effectivement dû. Pour le débiteur, c'est sûrement le moyen...

Taxe d’habitation, déclaration en ligne obligatoire pour tous les propriétaires

Depuis le 1er janvier 2023, la taxe d'habitation a été supprimée sur l'ensemble des résidences principales, quel que soit le revenu. Cependant, cela ne concerne pas les résidences secondaires, les logements vacants ou encore les logements locatifs à courte durée.Il va...

Le gestionnaire de résidences de tourisme peut-il s’exonérer du paiement de redevances à la SPRE si les lieux sont sonorisés ?

Le juge des référés et la Cour d'appel de Bordeaux rejettent une demande de paiement par la SPRE d'une provision sur la "rémunération équitable" visant les résidences de tourisme.Les exploitants d'un lieu sonorisé sont soumis à un double paiement de redevances, au...

Combien de temps pour poursuivre le notaire qui s’est trompé lors de l’envoi des fonds ?

La prescription de l'action en responsabilité du notaire ne court pas nécessairement du jour où ce dernier a commis une faute. La responsabilité de l'officier public est subsidiaire. Pour pouvoir poursuivre utilement le notaire, la victime doit prouver que son...

Les données personnelles d’un salarié sur un ordinateur professionnel sont-elles recevables ?

Le juge ne peut écarter des débats des éléments de preuve provenant de l'agenda électronique du salarié disponible sur son ordinateur professionnel sans avoir vérifié que ces pièces étaient identifiées par leur auteur comme personnelles.Après avoir pris acte de la...