Construire sur le terrain d’autrui, c’est nécessairement prendre un risque, puisque la règle générale fixée par le code civil (article 551) est fort simple : le propriétaire du terrain devient automatiquement propriétaire des constructions édifiées sur son terrain.
A partir de là, que peut faire la personne qui a ainsi construit sur le terrain d’un tiers, et dans quels cas peut-elle obtenir une indemnisation pour cela ?
Construire sur le terrain d’autrui : le cas des entrepreneurs
Il y a bien entendu un cas qui ne pose aucun problème, c’est celui de l’entrepreneur à qui l’on a demandé, en vertu d’un contrat, de réaliser une construction, ou encore des modifications ou des améliorations à une construction existante. Le propriétaire du terrain devra payer le prix convenu.
Construire sur le terrain d’autrui en l’absence de contrat
Les choses se compliquent lorsque le constructeur ne peut invoquer aucun contrat avec le propriétaire du terrain.
Le propriétaire du terrain est en effet toujours en droit d’exiger la suppression des constructions, si elles ne l’intéressent pas. Dans ce cas le constructeur ne reçoit aucune indemnité, il doit payer les frais de démolition, et il peut même être condamné à des dommages-intérêts.
Mais il peut aussi arriver que le propriétaire du terrain préfère garder les constructions.
Dans cette hypothèse, le propriétaire du terrain devra indemniser le constructeur, dans les conditions prévues par l’article 555 du code civil, en lui versant, à son choix « soit une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur, soit le coût des matériaux et le prix de la main-d’oeuvre estimés à la date du remboursement, compte tenu de l’état dans lequel se trouvent lesdites constructions, plantations et ouvrages. »
Construire sur le terrain de son concubin
M. X avait vécu pendant plusieurs années avec Mme Y, et pendant leur période de concubinage, il avait réalisé des améliorations à la maison dans laquelle vivait le couple, dont il se trouvait qu’elle était édifiée sur un terrain appartenant à Mme Y.
Après la séparation du couple, M. X a réclamé une indemnisation fondée sur le prix des matériaux qu’il avait achetés et sur celui de la main-d’oeuvre correspondant à sa participation personnelle. Il était tout à fait confiant dans le résultat, compte tenu des dispositions de l’article 555 : puique Mme Y voulait garder le bénéfice des constructions, elle devait lui régler une indemnité.
Il avait convaincu la cour d’appel de son bon droit, et celle-ci avait ordonné une expertise afin de déterminer le montant de l’indemnité à laquelle M. X pouvait prétendre pour sa participation à la construction de la villa, basée sur le coût des matériaux et le prix de la main d’oeuvre compte tenu de l’état actuel des constructions et ouvrages.
Pas si simple, répond la Cour de cassation. En cas de concubinage, aucune disposition légale ne règle la contribution des concubins aux charges de la vie commune. En conséquence, le principe est que chacun des concubins doit, en principe, supporter les dépenses de la vie courante qu’il a engagées.
Lorsqu’un des concubins réalise des travaux sur un immeuble appartenant à l’autre, il faut donc se demander s’il n’est pas seulement en train de s’acquitter de sa part dans les dépenses du couple.
Le concubin ne pourra prétendre à l’indemnité prévue par l’article 555 que s’il justifie que les dépenses de construction viennent en complément de sa participation dans les dépenses du ménage.
(Source : Cour de cassation, Civ. 1ère, 9 fèvrier 2022, 20-22.533, https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000045167434)
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