Utiliser les plans d’un architecte sans son accord, quels sont les risques ?

19 Oct. 2023 | Infos

L’architecte qui remet ses plans au maître de l’ouvrage conserve un droit moral sur son oeuvre personnelle et originale. La propriété du support matériel ne confère pas au propriétaire des « plans, calques, dessins et études » le droit d’en disposer librement sans l’accord de leur auteur.

Par un arrêt du 23 septembre 2023, la Cour d’appel de Bordeaux a rappelé que les oeuvres architecturales font partie des oeuvres protégeables au titre des droits d’auteur sous réserve que l’architecte démontre l’originalité et l’apport intellectuel créatif de son travail.

L’architecte, avant la rupture des relations contractuelles avec son client, avait remis au propriétaire du bâtiment les « plans, calques, dessins et études ». Le client prétendait avoir le droit d’en disposer librement et les utiliser pour poursuivre les travaux avec une autre société.

L’arrêt rappelle qu’il fallait une autorisation de l’architecte pour que le propriétaire des plans puisse les remettre à une société de construction en vue de l’achèvement de l’ouvrage.

Article - Utiliser les plans d'un architecte sans son accord, quels sont les risques ?

A défaut d’avoir sollicité cette autorisation, la Cour d’appel a condamné le propriétaire des plans à indemniser l’auteur et a ordonné la restitution des supports matériels contenant les plans, calques, dessins et études. Cette décision est fondée sur le droit d’auteur et réaffirme le principe d’indépendance de la propriété incorporelle et de la propriété du support matériel.

En effet, l’architecte est titulaire des droits moraux, mais dans la limite du respect du droit de propriété du propriétaire de l’oeuvre.

En l’espèce, aucune cession des droits d’exploitation des plans n’avait été consentie par l’auteur lié au commanditaire par le seul contrat passé entre les parties.

Une cession implicite des droits d’auteur n’était pas plus envisageable par application de l’article L. 111-1, alinéa 3, du code de la propriété intellectuelle qui précise que « L’existence ou la conclusion d’un contrat de louage d’ouvrage ou de service par l’auteur d’une oeuvre de l’esprit n’emporte pas dérogation à la jouissance du droit reconnu par le premier alinéa (..) ».

Cet arrêt rappelle la prudence avec laquelle doit être examinée la question du droit moral de l’architecte sur son oeuvre et la nécessaire analyse des droits des parties avant d’utiliser les plans d’un architecte avec lequel les relations se sont envenimées.

Avocat Daniel Lasserre de la société Elige Bordeaux

Auteur de l’article

Daniel LASSERRE
Avocat associé à Elige Bordeaux

0 commentaires

Opérations de paiement non autorisées : quels délais pour agir ?

Un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 2 juillet 2025 apporte une clarification importante sur l'interprétation de l'article L. 133-24 du Code monétaire et financier. Cette décision, qui met un terme à une divergence d'interprétation des...

Perte de chance : 2 arrêts de l’Assemblée plénière le même jour. Quelle chance !

Par deux arrêts du 27 juin 2025, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation a mis fin à une incertitude jurisprudentielle en matière de réparation du préjudice de perte de chance.Elle impose désormais au juge d'indemniser la victime pour une perte de chance...

Le pourboire dématérialisé, une aubaine pour l’URSSAF !

La dématérialisation des paiements, si pratique au quotidien, invite le droit à se pencher sur des usages aussi anciens que le pourboire. La Cour de cassation, dans un arrêt du 5 juin 2025, vient de trancher une question née de cette modernité : quel est le régime...

Assurance COVID : l’hôtel était-il du bon côté de la carte ?

Une décision de la Cour de cassation du 19 juin 2025 vient rappeler aux hôteliers les conditions très strictes pour obtenir l'indemnisation de leurs pertes d'exploitation subies durant la crise sanitaire. Pour les professionnels du secteur, l'enseignement est clair :...

La transparence dans la discipline notariale : encore un effort !

Dans un contexte d'évolution de la déontologie et de la procédure disciplinaire, la publication des décisions disciplinaires est essentielle, mais le syst-me actuel révèle des limites notables.Le cadre légal : un progrès depuis 2022L'ordonnance n° 2022-544 du 13 avril...

Les 5 choses à prendre compte lors d’un divorce ou une séparation

1. La résidence des enfants et l'autorité parentale.La question de la résidence des enfants et de l'exercice de l'autorité parentale est primordiale. Il s'agit de déterminer où vivront les enfants, comment seront organisés les droits de visite et d'hébergement, et...

Bulletin Elige – Numéro 10

Découvrez le bulletin Elige n°10consacré à nos avocats en Droit de la famille, des personnes et du patrimoine.Au sommaire de ce nouveau bulletin, on retrouve :PAGE 1Découvrez les avocats des sociétés Elige intervenant en Droit de la famille, des personnes et du...

L’IA juridique face au droit d’auteur, qu’en est-il vraiment ?

L'IA juridique face au droit d'auteur : la décision Thomson Reuters c/ Ross rebat les cartes.Le 11 février 2025, le tribunal fédéral du Delaware a rendu une décision qui fait l'effet d'un coup de tonnerre dans le monde de la LegalTech. L'affaire Thomson Reuters c/...

Rémunération des syndics de copropriété : rappel des règles du jeu !

La cour de cassation rappelle les règles du jeu en matière de rémunération des syndics de copropriété.Dans un arrêt rendu le 27 février 2025, la Cour de cassation vient de clarifier des points importants concernant la rémunération des syndics et les droits des...

En cas de fraude bancaire, la responsabilité des banques n’est plus automatique

Deux arrêts récents de la Cour de cassation viennent de redéfinir les contours de la responsabilité des banques en cas d'opérations frauduleuses. Ces décisions, rendues le 15 janvier 2025, ont des implications importantes pour les clients des établissements...