L’action paulienne est un outil juridique puissant, mais méconnu, qui permet à un créancier de contester une vente réalisée par son débiteur si cette vente a pour but de le priver de son dû. La Cour de cassation a récemment rendu une décision importante à ce sujet, le 29 janvier 2025, que nous allons décortiquer pour vous.
Qu’est ce que l’action paulienne ?
Imaginez la situation suivante : vous avez prêté de l’argent à une personne, mais celle-ci, plutôt que de vous rembourser, vend ses biens pour ne plus rien avoir à vous donner. L’action paulienne vous permet, sous certaines conditions, de faire annuler cette vente afin de récupérer votre argent.
Plus précisément, l’article 1341-2 du Code civil autorise un créancier à attaquer les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits. Il faut prouver que le débiteur a agi dans le but de vous nuire et, si la vente a été faite à une autre personne, que cette personne était au courant de la manœuvre frauduleuse.
L’affaire récente : une cession de fonds de commerce litigieuse.
Dans l’affaire jugée par la Cour de cassation, un expert-comptable n’avait pas été payé pour ses services par une société. Cette société, plutôt que de régler sa dette, a vendu son fonds de commerce (c’est-à-dire l’ensemble de ses éléments permettant d’exercer son activité, comme le nom commercial, la clientèle, etc.). L’expert-comptable a alors intenté une action paulienne pour faire annuler cette vente, estimant qu’elle avait été faite pour l’empêcher de récupérer son argent.
La cour d’appel avait rejeté sa demande, considérant qu’il ne prouvait pas que la société était insolvable au moment de la vente. C’est là que la Cour de cassation est intervenue.
La décision de la Cour de cassation :
une simplification importante.
La Cour de cassation a cassé la décision de la cour d’appel, en rappelant un principe essentiel : si la vente a pour effet de remplacer un bien facilement saisissable (comme un fonds de commerce) par de l’argent plus facile à cacher, alors le créancier n’a pas besoin de prouver que le débiteur est insolvable. Le préjudice subi par le créancier est considéré comme établi du seul fait de cette substitution.
En d’autres termes, si la vente rend plus difficile pour le créancier de récupérer son argent, alors l’action paulienne peut aboutir, même si le débiteur n’est pas complètement ruiné.
Pourquoi cette décision est-elle importante ?
Cette décision simplifie la procédure pour intenter une action paulienne dans certains cas, en supprimant la nécessité de prouver l’insolvabilité du débiteur. Cela renforce la protection des créanciers contre les manœuvres frauduleuses de leurs débiteurs.

Les conséquences pratiques.
Si vous êtes créancier et que vous constatez que votre débiteur vend ses biens, soyez vigilant. Si cette vente vous empêche de récupérer votre argent, vous pouvez réagir, en contestant les actes du débiteur.
Il est important de noter que chaque situation est unique et que les chances de succès d’une action paulienne dépendent des circonstances spécifiques de l’affaire. Toutefois, la décision de la Cour de cassation du 29 janvier 2025 constitue un atout supplémentaire pour les créanciers dans ce type de litige.
Source : https://www.courdecassation.fr/decision/6799cf39da62992b3320cf43

Auteur de l’article
Thierry WICKERS
Avocat associé à Elige Bordeaux
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