Dans un arrêt important rendu le 11 septembre 2024, la Chambre commerciale de la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence attendu concernant le sort du compte courant en cas de liquidation judiciaire [1].
Jusqu’à présent, la Cour de cassation considérait que « le compte courant d’une société étant clôturé par l’effet de sa liquidation judiciaire, il en résulte que le solde de compte est immédiatement exigible de la caution » (arrêt du 13 décembre 2016) [1].
Cette solution était critiquée car elle allait à l’encontre :
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- Du principe de continuation des contrats en cours posé par l’article L.641-11-1 du Code du commerce ;
- De la cohérence avec les règles applicables en sauvegarde et redressement judiciaire ;
- Des nécessités pratiques de la liquidation qui requièrent le maintien d’un compte bancaire.
Le revirement opéré par l’arrêt du 11 septembre 2024
La Haute juridiction abandonne désormais cette position en jugeant que : « L’ouverture ou le prononcé d’une liquidation judiciaire n’a pas pour effet d’entraîner la clôture du compte courant du débiteur » [1].
Elle en déduit que le solde du compte n’étant pas devenu exigible, la caution ne peut être poursuivie en paiement.
Les fondements et la portée de ce revirement.
Ce revirement s’appuie sur plusieurs éléments :
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- La lettre de l’article L.641-11-1 du Code de commerce qui pose le principe de continuation des contrats en cours, y compris en liquidation judiciaire ;
- L’absence d’exception légale concernant le compte courant ;
- Le pragmatisme, la liquidation nécessitant le maintien d’un compte bancaire.
La portée de cette solution semble large et applicable à toutes les liquidations judiciaires, quelle que soit leur date d’ouverture.
Conclusion.
Cette décision met fin à une incohérence et permet d’aligner le régime du compte courant en liquidation sur celui applicable en sauvegarde et redressement. Elle offre également une meilleure protection aux cautions, qui ne pourront être poursuivies tant que le compte n’est pas clôturé. Cependant, elle va obliger les banques à revoir leur process, et à intégrer la nécessité expresse du compte courant pour le rendre exigible en liquidation judiciaire.
Auteur de l’article
Thierry WICKERS
Avocat associé à Elige Bordeaux
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