A quoi sert un notaire ? A pas grand-chose, expliquait ce notaire poursuivi par une de ses clientes, après une vente immobilière, pour éviter que sa responsabilité professionnelle soit engagée.
La fonction d’authentification
Le notaire faisait valoir qu’il n’était intervenu qu’en bout de course, après la conclusion de la vente. Les parties s’étaient mises d’accord sur la chose et sur le prix. Il s’était contenté de donner ensuite forme authentique à la vente.
La vente, même la vente immobilière, est en effet un contrat consensuel. Ce contrat existe dès que l’acquéreur et le vendeur se mettent d’accord sur la chose (ici un bien immobilier) et le prix.
En réalité, l’existence de multiples règles relatives à l’urbanisme, aux conditions de crédit, aux vices cachés, etc. viennent un peu compliquer les choses.
Mais enfin, théoriquement, on peut donc parfaitement se passer d’un notaire, pour rédiger un acte de vente immobilière. D’ailleurs les avocats rédigent régulièrement des actes de vente immobilière pour leurs clients.
Néanmoins, le notaire reste un passage obligé, pour une raison simple : seuls les actes authentiques (les acte authentifiés par les notaires) peuvent être publiés au service de la publicité foncière. Ce dépôt est obligatoire pour rendre une vente opposable aux tiers. Il n’est pas nécessaire que l’acte de vente soit rédigé par le notaire, mais il faudra qu’il soit authentifié par ce dernier.
C’est donc la modestie de ce rôle d’authentification que le notaire mettait en avant. Après tout, si le notaire n’est sollicité qu’en bout de course et qu’il n’est pas l’auteur du contrat, l’authentificiation ne va guère concerner que la vérification des identités ou la date de l’acte.
Maintien du devoir de conseil
Le raisonnement avait convaincu la cour d’appel. La Cour de cassation l’écarte.
Ce n’est pas parce que le notaire n’est pas intervenu dans l’établissement du compromis de vente et que l’acte authentique n’a été dressé qu’après accord des parties sur la chose et le prix, que le devoir de conseil disparaît. Le rôle d’authentification ne se limite pas à donner un « coup de tampon ». Le notaire doit s’intéresser à l’acte qui lui est soumis et à la situation des parties. Il est tenu d’un devoir de conseil. S’il a omis de l’exercer, sa responsabilité professionnelle peut être engagée sur le fondement de l’article 1240 du code civil.
La loi rend obligatoire le passage devant le notaire, et elle lui attribue une rémunération généreuse. Il faut bien qu’une contrepartie existe.
(Cass. CIV 1ère, 7 juin 2023, Pourvoi n° P 21-23.142)
Auteur de l’article
Thierry WICKERS
Avocat associé à Elige Bordeaux
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